CNRS

Militantisme au CNRS : « La respectabilité morale devient garante des programmes de recherche »

5 min

ANALYSE - Linguiste, traducteur littéraire et professeur des Universités, Jean Szlamowicz a récemment publié Le sexe et la langue (2023, Intervalles) ainsi que Les moutons de la pensée (2022, Éditions du Cerf). Ses travaux portent principalement sur la linguistique, l’analyse de discours ainsi que la morphosyntaxe de l’oral. Le 19 février 2024, il a signé une tribune collective dans le magazine Le Point portant sur les dérives idéologiques du CNRS.

Université
Amphithéâtre du campus universitaire de NiceSYSPEO/SIPA

Factuel. Pourquoi avez-vous décidé de signer cette tribune parue dans le magazine Le Point appelant à ne pas faire du CNRS une « plateforme militante » ?

Jean SZLAMOWICZ. L’article publié par le CNRS « L’écriture inclusive par-delà le point médian », n’est pas digne d’une institution consacrée à la recherche scientifique et qui en est même l’une des plus éminentes vitrines pour le pays. C’est un texte indigent : sa qualité rédactionnelle est racoleuse, sa démarche unilatérale est malhonnête, ses sources sont biaisées, sa conceptualisation est caricaturale… C’est un article de vulgarisation vulgaire qui, au lieu de donner des clés de compréhension, de poser des enjeux scientifiques en les reliant à des phénomènes préfère picorer des arguments allant dans le sens d’une moralisation de la langue.

L’article confond les mots et les choses, néglige la polysémie des notions (« neutre » au sens de « sans effet » ou bien comme catégorie nominale), mélange la culture, les discours et les structures grammaticales, etc. Ce texte ne fait d’ailleurs que reprendre la confusion de nombreux universitaires qui mélangent le genre des personnes et le genre des signes linguistiques… Il reproduit des pétitions de principes (« la langue est sexiste », « les stéréotypes de genre ») et cite des universitaires parfaitement ignorants en linguistique, comme Eliane Viennot. De manière symptomatique, il n’est d’ailleurs pas question de linguistique, ce qui est un comble, mais de « psycholinguistique » et de « sciences cognitives », termes potentiellement fourre-tout mais dont la seule mention a un effet d’autorité.

Tout y est discutable : on y parle de « langue inclusive », alors qu’il ne s’agit pas de langue à proprement parler, mais de façons de s’exprimer ou d’écrire relevant de la recommandation morale — des bonnes manières, en somme. C’est d’ailleurs confirmé car le texte reproduit les recommandations du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes… comme si la...

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