Samuel Paty

Samuel Paty : « Lors de notre dernier déjeuner, il n’a pas dit un mot »

8 min

ENTRETIEN - Factuel a recueilli, sous couvert d'anonymat, les propos d'un enseignant proche du professeur d’histoire-géographie assassiné en pleine rue à quelques mètres de son collège de Conflans-Sainte Honorine, le 16 octobre 2020.

Samuel Paty
Hommage rendu à Samuel Paty devant son collège du Bois d'AulneROMUALD MEIGNEUX/SIPA

FACTUEL. Deux ans et demi après l’assassinat de votre collègue Samuel Paty par un islamiste tchétchène, Abdoullakh Anzorov, quel regard portez-vous rétrospectivement sur cet engrenage fatal ?

Quand on est professeur dans l’Éducation nationale, on n’imagine pas qu’on puisse être menacé de mort simplement pour avoir exposé des idées. C’est difficile d’imaginer l’inimaginable. On est en France, pas en Afghanistan, au Pakistan ou dans je ne sais quelle dictature islamiste. En montrant les caricatures de Charlie Hebdo à ses élèves, Samuel a voulu illustrer la question de la liberté d’expression : « Faut-il les publier ou non » ? C’était le sujet du débat ce jour-là (le lundi 5 octobre 2020, NDLR). Cela faisait quatre ans qu’il faisait ce cours, sans que cela pose le moindre problème. Si je me place du point de vue d’un musulman, je comprends que cette caricature (la caricature de la dessinatrice Coco légendée « Mahomet : une étoile est née » présentant le prophète de l’islam dans son plus simple appareil, avec une étoile dans les fesses, NDLR) puisse émouvoir. Mais de là à tuer quelqu'un pour un tel motif, ce n’est pas tolérable.


Pouvez-vous nous raconter la journée du vendredi 16 octobre 2020 ? Avez-vous vu Samuel Paty ce jour-là ?

C’était le dernier jour avant les vacances. Avec d’autres collègues, j’ai déjeuné avec Samuel à la cantine du collège. Il m’a demandé si je pouvais le raccompagner plus tard dans la journée. J’avais une heure de trou de 15h45 à 16h45 et à cette heure-là, je devais m’occuper des « devoirs faits » (heure d’étude consacrée aux devoirs des élèves, NDLR). Je m’étais porté volontaire pour assurer le suivi de quatre élèves. Or, à 16h45, c’était l’heure de sortie de Samuel. Je lui ai donc dit que je ne pouvais pas le prendre en voiture à la sortie du collège, comme...

Nos recommandations

Vous aimerez aussi

s
partagez

Partagez une information avec notre rédaction

Factuel Media. Les faits sont têtus, nous aussi.

Découvrez encore plus

abonnez-vous