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La France doit-elle envier le parlementarisme italien ?

Fabrizio Tribuzio-Bugatti

L’avènement du second quinquennat d’Emmanuel Macron s’est caractérisé par le recours fréquent, abusif pour certains, de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution. La Ve République, survenue en des temps troubles pour mettre un militaire à la tête de l’État, ne pouvait elle ainsi que dériver en espèce d’autocratie voulue par la rationalisation moderne de la politique ?

Intronisation par Sergio Mattarella du nouveau gouvernement dirigé par Giorgia Meloni
Intronisation par Sergio Mattarella du nouveau gouvernement dirigé par Giorgia MeloniMassimo Di Vita/Mondadori Portfo/SIPA

Les juristes en droit public, dès leur première année d’études, apprennent rapidement que la Ve République n’est en rien un régime présidentiel, mais un « parlementarisme hyper rationnalisé », pour reprendre la formule consacrée. Si elle rationalise le pouvoir législatif en séparant la promulgation des lois de celle des règlements — dévolus respectivement au parlement et au gouvernement — et sort le président de la République de son rôle de « président des chrysanthèmes », elle fait toujours de l’élection législative le scrutin-clé de son système institutionnel, duquel est censé procéder le gouvernement que conduira le Premier Ministre.

Les années 2010 et le début de la décennie 2020 ont cependant consacré un ascendant incontestable de l’exécutif sur le pouvoir délibératif, et même du président de la République sur le gouvernement comme de la majorité parlementaire, jetant une confusion des rôles que les constituants de l’époque n’avaient pas prévu. Il serait cependant malvenu de reprocher à Michel Debré ou René Capitant de ne pas avoir su anticiper l’avènement des cabinets de conseils tels que McKinsey, véritables supplétifs de la décision publique, mais aussi d’un nouveau genre de personnel politique tout droit sorti des écoles d’administration. Voici désormais les énarques, initialement formés pour exécuter la décision publique, revêtir le rôle de ceux qui étaient jadis leurs supérieurs hiérarchiques, instaurant un type de vocabulaire qui ne se veut plus politique, mais uniquement administratif. Il ne s’agit dorénavant plus tant de parler de grandes orientations nationales que de faire la part belle aux discours invoquant divers mots-clés tels que « responsabilité », « crise », « efforts », et autres formules indiquant au citoyen qu’il n’a désormais plus d’alternative politique mais uniquement le choix mineur d’élire l’équipe qui conduira un projet immuable.

C’est ainsi que la réforme des retraites, qui a secoué le début de l’année 2023, a été présentée. Invoquant tous les lieux...

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Souvenirs du bel paese

Fabrizio Tribuzio-Bugatti

Fabrizio Tribuzio-Bugatti est juriste et essayiste. Il a été rédacteur en chef de la revue pasolinienne Accattone. Son dernier livre est « Le futur était déjà fini » (éditions des 60 – L'esprit du temps).


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