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Lutter contre la nature

Armand Heitz

Ça devient systématique. Chaque année ou presque, aux mois d’avril, mai, nous voici forcés d’allumer des bougies ou des braseros dans nos vignes. Certains procèdent autrement, ils font tourner des éoliennes ou des hélicoptères pour brasser l’air et le réchauffer au-dessus des parcelles. Le but final étant le même : protéger les bourgeons déjà sortis pour éviter qu’ils ne gèlent et perdre sa récolte. Ça fait des jolies photos et vidéos, des publications aimées et partagées. Mais pourquoi l’Homme préfère-t-il lutter contre la nature plutôt que de s’adapter ?

Cépages
Mais pourquoi l’Homme préfère-t-il lutter contre la nature plutôt que de s’adapter ?

Nous avons tous vu le film d’Al gore Une vérité qui dérange. L’Homme met des glaçons dans l’océan pour lutter contre le réchauffement climatique. Je trouve que nous sommes sur le même procédé avec nos pratiques actuelles dans les vignes pour lutter contre le gel. Ce sont des « solutions » court-termistes qui ne traitent pas le problème à la base. Nous subissons plus que nous agissons. Des sommes importantes sont dépensées pour cette lutte, des dizaines de milliers d’euros chaque année. L’Europe aide financièrement les vignerons à lutter contre la nature. Ce n’est pas un serpent qui se mord la queue, c’est carrément un crocodile qui se marche sur la tête.

Nous avons la mémoire trop courte. Avant 1960, nos parcelles n’étaient pas composées de clones. Il y avait donc au sein des vignes des pieds plus ou moins précoces, plus ou moins fertiles. Une véritable diversité. Jamais les moines qui ont construit notre vignoble n’auraient planté des vignes qui gèlent tous les ans ! C’est une aberration face à laquelle tout le monde semble bien s'accommoder.

Les sélections clonales sur nos cépages ne sont-elles pas complètement obsolètes ?

Nos cépages n’ont que très peu de résistance face au gel mais également contre les maladies. Mais comme nous avons de bons traitements chimiques qui permettent de combattre ces maladies, tout va bien ! Il semblerait que l’aspect économique prenne largement le pas sur la pérennité environnementale. Beaucoup d’argent est en jeu ; la vente d’engrais, de traitements, les petits rendements que ce fonctionnement engendre rendent les vins plus rares et donc plus chers. Un système économique vertueux est en place donc pourquoi changer ?

Il faut donc rappeler que dans les années 60, l’IFV et l’INRA ont décidé de mettre en place une sélection génétique de cépages. Ils ont jugé bon de prendre les...

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Armand Heitz

Armand Heitz est ingénieur et agronome, mais il préfère se définir comme un paysan. Viticulteur, éleveur, agriculteur mais il est surtout un passionné de son terroir bourguignon et des traditions françaises.


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