La rébellion de Wagner, syndrome des luttes internes au sein du Ministère de la Défense de la Russie

Depuis plusieurs mois déjà, dans le cadre de sa participation et de celle de ses mercenaires au siège de la ville de Bakhmout dans le Dombass, Evgueni Prigojine s'était illustré par des accusations, largement filmées et diffusées, à l'égard des deux hommes, qui tenteraient selon lui d'entraver l'approvisionnement en munitions du groupe Wagner à des fins politiques.

Vingt-quatre heures d'incertitude

En quelques heures, un convoi de véhicules militaires appartenant au groupe Wagner emprunte la route fédérale M4 en direction de Moscou, et passe par les villes de Rostov-sur-le-Don et de Voronej, qu'il occupe sans résistance. Des échanges de coups de feu éclatent entre les forces armées russes et les mercenaires de Wagner.

Le 24 juin au soir, après une journée d'extrême tension, un accord est conclu entre Vladimir Poutine, Alexandre Loukachenko (Président de la Biélorussie) et Evgueni Prigojine. Ce dernier annonce, à la stupéfaction générale, la fin des hostilités et de sa « marche pour la justice ». Il ordonne à son convoi, alors à 200 kilomètres de Moscou, de retourner au front dans le calme, avant de s’expatrier avec l’ensemble du groupe Wagner, sans plus d’explications, en Biélorussie. Bilan : au moins 10 morts de part et d'autre, ainsi que 7 aéronefs abattus.

Cette crise, qui a suscité les fantasmes les plus fous de la part de toutes les parties prenantes au conflit russo-ukrainien, est symptomatique de luttes intestines au sein de l'appareil d'état russe. Ces dernières, bien qu'elles fassent la plupart du temps peu de bruit, peuvent, comme nous l'a montré cet épisode, avoir un impact non négligeable sur la conduite des opérations dans le cadre d'une guerre moderne de haute intensité.

Dans ce cadre, je vous propose de nous pencher, pour ce premier article, sur les coulisses de cette crise qui a secoué le Ministère de la Défense de...