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Les défis posés par la Terra nullius, « territoire sans maître », sur les rives du Danube

Andréa Clément

Des territoires qui n’appartiennent à personne ? Aussi étrange que cela puisse paraître, il en existe bel et bien. On retrouve des Terrae nullius, territoires sans maître, la plupart du temps comme étant l’objet de discordes entre États, ou autres entités.

Célébration du deuxième anniversaire du Liberland
Célébration du deuxième anniversaire du LiberlandDavid Tesinsky/SIPA

Au travers de l’Histoire et de l’évolution du droit international, la définition n’a pas toujours été constante. En effet, au XIVe et au XVe siècle, des territoires, même peuplés, sont qualifiés de Terrae nullius, car ces derniers ne répondent pas aux critères occidentaux d’une organisation étatique organisée. La stratégie derrière ce terme a longtemps justifié la colonisation forcée, de l’Australie aux Balkans, en passant par l’Afrique et les Amériques. Ainsi, à cette époque, c’est au Pape que revient la décision de trancher sur la souveraineté de ces « territoires sans maître ».

Pour preuve d’exemple, entre le XVIIIe et le XXe siècle, la monarchie des Habsbourg utilise ce statut pour annexer des territoires balkaniques, alors peuplés de chrétiens non-catholiques. Ce sera par exemple le cas de la Serbie en 1718 ou de la future Bosnie-Herzégovine en 1908.

« La nature a horreur du vide »

Aujourd’hui, cette notion est interprétée de manière plus restrictive, évitant toute remise en question des frontières que l’on connaît, ou presque. Le droit international décrit désormais comme Terra nullius une zone qui n’a jamais été soumise à la souveraineté d’un État, ou sur laquelle un État qui y aurait été souverain y a expressément renoncé. De plus, l’acquisition d’un territoire ne peut se faire ni sur simple déclaration ni par un acte symbolique. Ainsi, planter son drapeau au beau milieu d’une terre ne suffit plus. Cette définition plus limitative est établie depuis l’avis consultatif rendu par la Cour Internationale de Justice en 1975, au sujet du Sahara occidental [1].

La nature ayant horreur du vide, rares sont les territoires qui ne sont ni revendiqués, ni désirés. Pourtant, les quelques exemples d’espaces laissés seuls que nous ayons entrainent, parfois, la création de micro-nations par des individus qui se sont engouffrés dans ce flou juridique. Si cela peut faire sourire...

Commentaires

Repetita iuvant

Andréa Clément, diplômée d’un Master 2 Sciences Politiques, Relations Internationales, Sécurité Défense, est conseillère en affaires militaires auprès de la Fédération de la Diplomatie des Nations Unies. Après plusieurs séjours à l’étranger, c’est notamment son expérience en tant qu’analyste au sein de l’ambassade de France à Sarajevo qui l’a conduite à travailler sur Balkans occidentaux.


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