SociétéUrbanisme

Les quatre temps des émeutes urbaines - Première partie

Thibault Tellier

La règle de l’emballement médiatique est telle que les premiers embrasements avaient à peine commencé qu’il fallait déjà réfléchir à une explication rationnelle, si possible convaincante. En réalité, le bruit de l’événement fait qu’il paraît difficile d’amorcer une analyse rationnelle qui résisterait à l’épreuve des faits si l’on ne le resitue pas dans la durée. C’est l’objectif de ce blog, qui consiste à rappeler les références historiques d’un sujet d'actualité, ayant trait à la ville en général.

CRS à Paris
CRS à ParisVladimir Milivojevic/SIPA

Il s’agit d’objectiver les faits en proposant un schéma narratif, basé sur une réflexion historienne, qui se détache des contingences politiques, idéologiques. Il s’agit aussi de ne pas céder au présentisme, décrivant la ville comme le lieu de l’invention permanente : les tiers-lieux puisent leur inspiration dans l’éducation populaire ; les jardins dits partagés ou communautaires ont pour matrice les jardins ouvriers de la fin du XIXe siècle ; la participation des habitants renvoie aux conseils de locataires créés au début du XXe siècle.

Si le fonctionnement de la ville ne peut, bien évidemment, être centré sur les violences qui s’y déroulent, l’actualité fait qu’il est, toutefois, nécessaire de s’interroger sur les ressorts profonds de la crise que nous traversons aujourd’hui. Les trois premières chroniques de ce blog seront consacrées à établir une généalogie, ou du moins une filiation avec les émeutes urbaines, qui viennent d’avoir lieu. Elles sont en réalité le fruit d’une longue histoire qui s’incarne dans les rapports – parfois tumultueux – entre pouvoirs urbains et habitants de quartiers populaires.

La ville, épicentre des violences populaires

La première réflexion consiste à rappeler que la ville a été, depuis l’antiquité, l’épicentre de violences populaires déclenchées par des factions, alors en révolte contre le pouvoir en place. Cela s’est poursuivi logiquement au moyen-âge. Si la majorité d’entre elles se déroulent dans le monde rural pour des raisons démographiques (en partie la grande Jacquerie après la peste noire de 1348), certaines villes ne sont pas épargnées. La plus célèbre, celle des « Ciompi », se déroule à Florence en 1378. Les ouvriers se rebellent contre des salaires trop bas mais aussi contre le chômage qui commence à les toucher. Les villes sont, de fait, des lieux de tension permanente entre les notables, qui exercent le pouvoir majoral, et les faubourgs populaires, qui se...

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La ville, toute une Histoire

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Thibault Tellier, Professeur d'histoire contemporaine à Sciences Po Rennes, spécialiste d'histoire urbaine.


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