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Niger : exemple de l’amoralité de la géopolitique

Samuel Furfari

Le coup d’État au Niger est un cas d’école, nous rappelant qu’il n’y a pas de morale en géopolitique, et plus particulièrement en politique énergétique.

Manifestation au Niger
Manifestation au NigerSam Mednick/AP/SIPA

Un coup d’État amoral dans un pays amoral

Après le Mali, c’est au Niger que la politique africaine de la France est mise à l’épreuve. Le 28 juillet, le général Abdourahamane Tchiani, chef de la garde présidentielle, a renversé le président du Niger, Mohamed Bazoum, en poste depuis 2021. Le général Tchiani avait été propulsé par Mahamadou Issoufou, l’ancien président qui a « régné » sur le Niger de 2011 à 2021, mais qui n’était pas rééligible.

Leslie Varenne, co-fondatrice de l’Institut de veille et d’études des relations internationales, Iveris, est une grande spécialiste de la géopolitique de l’Afrique. Elle a donc immédiatement publié un article lorsque la junte militaire a pris le pouvoir à Niamey. Elle écrit « il faut en finir avec la fable du "Niger, exemple pour la démocratie" », car malgré cette litanie du « président démocratiquement élu  », rien n’est moins vrai. Elle se demande si Mahamadou Issoufou n’a pas été l’instigateur d’un coup d’État.

Alors que le Niger est le pays le plus pauvre du monde, selon l’indice mondial de pauvreté multidimensionnelle des Nations Unies de 2022, tout cela sent la corruption et l’uranium. Le nom d’Issoufou apparaît deux fois sur la liste des personnes ayant reçu des pots-de-vin lors de l’achat en 2011 de 2 500 tonnes d’uranium par Orano (ex-Areva, alors dirigée par Anne Lauvergeon). Cet « uranium gate » aurait entraîné une perte de près de 101 millions de dollars pour Areva. Mahamadou Issoufou aurait reçu pas moins de 3,4 millions de dollars selon Monde Afrique (mai 2023). Il aurait en 2020, selon la Cour des comptes du Niger, une fortune personnelle officielle de 3,5 millions d’euros, mais sa fortune non déclarée est difficilement estimable. Tout semble indiquer que nous n’en sommes qu’au début des preuves recueillies par les justices américaine et française, qui...

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Géopolitique de l’énergie

Puits de pétrole

Samuel Furfari est un ingénieur polytechnicien et docteur en sciences appliquées de l'Université libre de Bruxelles. Pendant 36 ans, il a été haut fonctionnaire à la Direction générale de l'énergie de la Commission européenne. Il est professeur de géopolitique et de politique énergétique depuis 20 ans, actuellement à l'ESCP-Londres et pendant 18 ans à l’ Université Libre de Bruxelles Il est l'auteur de nombreux articles et de 18 livres sur l'énergie et le développement durable. Son dernier livre est « Energy insecurity. The organised destruction of the EU’s competitiveness. »


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