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Pesticides : fonds d’indemnisation cherche victimes, désespérément

Marcel Kuntz

Ce blog donne « Carte Blanche » à Philippe Stoop, Docteur en Agronomie, Directeur R&D de la société ITK, membre de l’Académie d’Agriculture de France.

Tracteur lors d'une récolte
Tracteur lors d'une récolteMourad ALLILI/SIPA

Le CHU (Centre Hospitalier Universitaire) d’Amiens a créé fin 2023 une consultation « Pesticides et pathologies pédiatriques », la première de ce type en France. Son objectif est d’accueillir les « enfants atteints de leucémies, tumeurs cérébrales, hypospadias et/ou fentes labio-palatines..[pour]… reconnaitre l’exposition professionnelle d’un parent ou des deux parents aux pesticides… Une demande d’indemnisation au Fonds d’Indemnisation des Victimes de Pesticides sera recommandée ou non selon la situation » [1]. Les attendus et les objectifs de cette consultation ont été détaillés dans un article récent du Monde [2].

Vu la façon dont la recherche sur les effets sanitaires des pesticides est habituellement présentée, cette démarche peut paraître salutaire. En fait, c’est une très étrange idée d’un point de vue scientifique, pour des raisons faciles à comprendre si on y réfléchit un peu. Commençons par l’exemple de l’hypospadias, une malformation congénitale du pénis, mise en avant par l’article du Monde, sur la foi d’un cas unique vu en consultation. Cette pathologie assez commune a deux facteurs de risque clairement identifiés :

· Un facteur génétique (le risque est près de 4 fois plus élevé dans les familles où un cas a déjà été identifié).

· Les fécondations in vitro (risque 5 fois plus élevé qu’une grossesse naturelle).

L’effet de perturbateurs endocrinien est également suspecté, ce qui peut inclure certains pesticides, mais aussi d’autres substances encore bien plus fréquentes dans l’environnement tels que les PCB ou  phytoœstrogènes d’origine végétale, contenus par exemple dans le lait de soja [3].

Beaucoup d’incertitudes subsistent donc sur les causes de cette malformation congénitale, et les pesticides ne semblent pas une piste prioritaire pour l’INSERM[4], dont les expertises collectives sur les pesticides et la santé font référence : le premier rapport de 2013 mentionnait bien l’hypospadias, mais soulignait que les résultats à son sujet étaient très contradictoires. Dans le...

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Science et Postmodernité

 Marcel Kuntz

Marcel Kuntz est biologiste, directeur de recherche au CNRS, enseignant à l’Université Grenoble-Alpes, et  Médaille d’Or 2017 de l’Académie d’Agriculture de France. Son dernier ouvrage :  De la déconstruction au wokisme. La science menacée (VA Editions). Ses écrits ne représentent pas une position officielle de ses employeurs.


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